Un entretien avec Bertrand Godeau
Pour vous quel est la place du rituximab
dans les PTI ?
Je pense
que ce traitement malgré l’absence d’étude
randomisée à clairement sa place chez les patients en échec
de splénectomie. L’étude prospective qui a été
menée en France montre une réponse dans 40 % des cas chez
les patients non splénectomisés stable à un an.
Cette étude pourrait modifier notre attitude et nous conduire
à utiliser le rituximab en première intention avant la
splénectomie au moins chez les patients âgés ou
fragiles pour lesquels une splénectomie est dangereuse. Pour
les patients plus jeunes la question reste encore débatue.
Par contre, il ne faut certainement pas utiliser le rituximab trop tôt,
dans un PTI aigu puisque l’on sait que dans 30 % des cas la maladie
va guérir avant 6 mois.
Y a-t-il une corrélation
entre la gravité du PTI et l’efficacité du rituximab
?
La réponse
est à la fois oui et non. Non si l’on se base sur la gravité
en termes de chiffre de plaquettes puisque dans l’étude
que nous présentons la réponse n’est pas liée
au chiffre de plaquette initial. En revanche, on voit que les patients
jeunes et ceux qui ont eu peu de ligne de traitement répondent
mieux au rituximab. Ce qui suggère indirectement que les patients
ayant des PTI plus sévères ont peut être un peu
moins de chance de répondre.Toutefois je pense que le rituximab
à sa place même dans les PTI réfractaires.
Que pensez-vous des agonistes
du récepteur à la thrombopoïetine (TPO) ?
Tout d’abord,
je pense que c’est tout à fait passionnant au plan du mécanisme
d’action. Si, il y a 5 ans, on m’avait proposé d’utiliser
un tel analogue dans les PTI, j’aurais pris mon interlocuteur
pour un farfelu. Je suis tout à fait impressionné par
les résultats présentés dans la session d’aujourd’hui
(qui donnent 80 % de réponse alors qu’il s’agit de
molécules différentes provenant de laboratoires différents.
On a manifestement mis le doigt sur quelque chose. Ca c’est le
premier point. Le deuxième point est que l’on a affaire
à un traitement suspensif, on ne va pas guérir un patient
en stimulant la TPO. Et là on arrive dans une véritable
révolution intellectuelle puisque jusqu’ici, dans les maladies
auto-immunes, on a toujours cherché à guérir les
patients alors que l’on rentrerait dans une thérapeutique
qui serait purement symptomatique, on débuterait un traitement
en sachant qu’il serait très prolongé, voire à
vie. Les indications de ce traitement ne sont, pour l’instant,
pas très claires. Ils sont clairement utiles chez les patients
réfractaires à tout, ces patients sont très rares
mais ils existent. Ils ont un risque de décès et pour
ceux qui ont résisté aux corticoïdes, au rituximab,
à la splénectomie, aux immunosupresseurs, l’utilisation
de ces agonistes semble justifiée.
La deuxième indication est de faire monter les plaquettes de
façon transitoire avant par exemple une intervention chirurgicale.
Mais il ne faut pas oublier que la bonne vieille prednisone qui n’est
pas chère et non toxique lorsqu’on la donne sur de courtes
périodes est efficace dans 70 à 80 % des cas. Je ne suis
pas sûr qu’un produit très couteux soit la solution.
La troisième indication pourrait être après la phase
initiale de la maladie et pendant ce délai de 6 mois durant lequel
on va discuter de l’indication de la splénectomie ou du
rituximab, je pense que les agonistes de la TPO auront leur place. Il
reste tout de même des interrogations sur la sécurité
de ce produit, je pense qu’il faut vraiment être prudent
et avoir un recul supplémentaire.