mardi 5 novembre 2013

Entretien en décembre 2011 avec Bertrand Godeau - Professeur au CHU Mondor à Créteil

Un entretien avec Bertrand Godeau


Pour vous quel est la place du rituximab dans les PTI ?

Je pense que ce traitement malgré l’absence d’étude randomisée à clairement sa place chez les patients en échec de splénectomie. L’étude prospective qui a été menée en France montre une réponse dans 40 % des cas chez les patients non splénectomisés stable à un an. Cette étude pourrait modifier notre attitude et nous conduire à utiliser le rituximab en première intention avant la splénectomie au moins chez les patients âgés ou fragiles pour lesquels une splénectomie est dangereuse. Pour les patients plus jeunes la question reste encore débatue.

Par contre, il ne faut certainement pas utiliser le rituximab trop tôt, dans un PTI aigu puisque l’on sait que dans 30 % des cas la maladie va guérir avant 6 mois.

Y a-t-il une corrélation entre la gravité du PTI et l’efficacité du rituximab ?

La réponse est à la fois oui et non. Non si l’on se base sur la gravité en termes de chiffre de plaquettes puisque dans l’étude que nous présentons la réponse n’est pas liée au chiffre de plaquette initial. En revanche, on voit que les patients jeunes et ceux qui ont eu peu de ligne de traitement répondent mieux au rituximab. Ce qui suggère indirectement que les patients ayant des PTI plus sévères ont peut être un peu moins de chance de répondre.Toutefois je pense que le rituximab à sa place même dans les PTI réfractaires.
Que pensez-vous des agonistes du récepteur à la thrombopoïetine (TPO) ?

Tout d’abord, je pense que c’est tout à fait passionnant au plan du mécanisme d’action. Si, il y a 5 ans, on m’avait proposé d’utiliser un tel analogue dans les PTI, j’aurais pris mon interlocuteur pour un farfelu. Je suis tout à fait impressionné par les résultats présentés dans la session d’aujourd’hui (qui donnent 80 % de réponse alors qu’il s’agit de molécules différentes provenant de laboratoires différents. On a manifestement mis le doigt sur quelque chose. Ca c’est le premier point. Le deuxième point est que l’on a affaire à un traitement suspensif, on ne va pas guérir un patient en stimulant la TPO. Et là on arrive dans une véritable révolution intellectuelle puisque jusqu’ici, dans les maladies auto-immunes, on a toujours cherché à guérir les patients alors que l’on rentrerait dans une thérapeutique qui serait purement symptomatique, on débuterait un traitement en sachant qu’il serait très prolongé, voire à vie. Les indications de ce traitement ne sont, pour l’instant, pas très claires. Ils sont clairement utiles chez les patients réfractaires à tout, ces patients sont très rares mais ils existent. Ils ont un risque de décès et pour ceux qui ont résisté aux corticoïdes, au rituximab, à la splénectomie, aux immunosupresseurs, l’utilisation de ces agonistes semble justifiée.

La deuxième indication est de faire monter les plaquettes de façon transitoire avant par exemple une intervention chirurgicale. Mais il ne faut pas oublier que la bonne vieille prednisone qui n’est pas chère et non toxique lorsqu’on la donne sur de courtes périodes est efficace dans 70 à 80 % des cas. Je ne suis pas sûr qu’un produit très couteux soit la solution.

La troisième indication pourrait être après la phase initiale de la maladie et pendant ce délai de 6 mois durant lequel on va discuter de l’indication de la splénectomie ou du rituximab, je pense que les agonistes de la TPO auront leur place. Il reste tout de même des interrogations sur la sécurité de ce produit, je pense qu’il faut vraiment être prudent et avoir un recul supplémentaire.

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